Lara: La lumière du soir décline doucement.
Les paysages du Nord de la Pologne sont magnifiques : forêts, lacs, fermes, étangs, bouleaux se succèdent devant mes yeux. Serge somnole en face de moi, dans ce compartiment vide qui semble presque réservé pour nous. C'est un doux moment de calme.
C'est aussi ça le voyage. C'est bien ce que j'étais venue chercher... Pourquoi de tels instants sont-ils si rares ? Qu'est-ce qui ne va pas en nous pour que nous soyons si incapables d'être légers, heureux, surs de nous ?
Le " rêve au bout du rail " s'est doucement métamorphosé. La Russie est derrière nous. Ce rêve là s'est révélé être un mirage. Ou un rendez-vous raté ? Nous n'étions peut-être pas dignes d'elle. Pas assez mûrs, pas assez forts, trop sages ?
Reste une terrible envie d'écrire, de retraverser en mots les émotions de ce voyage à deux... et si , au fond, c'était pour cela justement que j'avais tant envie de partir ? La Russie n'était peut-être qu'un prétexte comme un autre ? Le rêve est toujours là, au bout du rail, à Lyon. Un rêve aussi ancien que moi, aux couleurs créatives et apaisantes. Ce rêve-là s'est renforcé en cours de route, mais j'ai l'impression d'en être toujours aussi loin ! Avoir fait tout ce chemin pour voir l'horizon s'éloigner encore, toujours hors d'atteinte, c'est dur.
Quel train faut-il prendre pour rattraper le rêve au bout du rail de notre imagination ?
Nous sommes arrivés à Lyon. Nous avons marché jusqu'à la maison, sacs au dos, main dans la main. Et comme dans les contes, nous sommes revenus d'où nous étions partis, à pied, il y a bien longtemps. Et le printemps était là.
Nous avons rangé nos sacs, retrouvé la maison, retrouvé notre vie. Et c'était bon.
Nous sommes allés voter, dans la petite école du coin de la rue. Les magnolias étaient en fleurs. Nous avons réparé nos vélos, et ça , ça voulait dire beaucoup de choses pour nous ! On était dimanche soir, le voyage était fini, mais au fond de moi, j'ai senti que le voyage le plus important ne faisait que commencer.
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