TPTV*
*lire la suite pour comprendre...
Lara : La prochaine halte du train a une durée annoncée de vingt minutes. Nous décidons d'en profiter pour descendre un peu nous dégourdir les jambes et faire le plein en eau. Le soleil brille, j'en ai marre de cuire à trente degrés dans le wagon...
Serge : Le train s'immobilise en gare de Lacinovataïa, non loin de la frontière ukraino-russe. Nos passeports ont déjà été pré-contrôlés une fois par des douaniers roulants. Nous sommes prévoyants : il a beau faire grand beau dehors, nous ne sommes pas dupes et prenons la plupart de nos protections contre le froid, tout heureux de les utiliser " pour de vrai ". Nous ne laissons que les gants de Lara et nos couvre-chefs. Nous sortons dans un triple but : nous approvisionner en victuailles, mitrailler, et nous dégourdir dans l'air piquant quelques minutes, le temps d'oublier l'air sec et affreusement surchauffé du train.
Dehors, tout est " bleu ". Je ne sais pas comment décrire cette impression profonde : le ciel est d'un bleu léger, vif et clair. Le blanc de la neige omniprésente se fond dans le bleu subtil des ombres glacées. Le train lui-même est peint en bleu-russe et la lumière d'hiver (qui frappe l'œil habitué à la pénombre du wagon) donne à la scène un éclat particulier. Il n'y a rien de bien spécial dans cette petite gare paumée. Des cheminées d'usines fument non loin d'une église orthodoxe coiffée d'or. " Normal ", quoi ! Tiens... la gare a l'air d'avoir été refaite à neuf. Elle est toute pimpante, avec ses proportions incompréhensibles de salle de danse, ses moulures de stuc et ses lustres dorés. Pour qui a-t-on déployé tout ce faste ? J'admire, je m'étonne (les mystères de la logique russe m'épateront toujours... ). Nous achetons deux beignets à la viande bien gras et bien chauds et Serge descend aux toilettes remplir notre gourde d'eau dite potable. On dirait deux gamins à la récré...
Le panneau lumineux de la gare, suspendu au-dessus des voies, indique plus sept degrés, mais nous comprenons rapidement par les sensations piquantes sur le visage que le plus est une erreur et qu'il doit en réalité faire plutôt moins sept. Nous entrons dans la gare, dont le hall somptueux semble décalé pour une ville équivalente à Dôle. Nous achetons, nous errons, nous admirons, nous mitraillons comme il se doit.
Il est temps de revenir vers les trains. Je vois un train long et bleu, semblable au notre, défiler et s'éloigner doucement au loin dans la même direction que le notre, vers le Sud Est. Je me dis, tiens, " un train semblable au notre qui part presque en même temps que le notre, dans la même direction, décidément, que de trafic dans cette gare de petite ville ! ". Je ne dis rien, tant la remarque est anodine, et me recentre sur l'objectif : notre train à nous. Celui qui est là, devant, dont les abords, sur le quai, sont d'ailleurs sillonnés de formidables panaches de neige transportée par les forces éoliennes. De quoi faire une photo terrible. Je sors donc l'engin, pour un énième mitraillage en règles. Je vise, et vois donc, à travers le viseur, ce wagon, juste devant moi, là, tout vert, avec ces filets blancs qui rendent le sol évanescent. Stop. Tout quoi ? Tout vert. Oui. C'est ça. Vert. Stop.
Mais il est temps de regagner notre place dans le wagon. Nous retraversons les voies. Non, ça n'est pas ce train là (il est vert). Ca doit être derrière, alors ? Ah, ben tient, non, il n'y a plus rien derrière ! J'ai du me tromper.
Stop, stop, stop... Pas de panique. Notre train est bleu, nous le savons. Ces wagons sont verts, il faut l'admettre. Il faut en déduire que ce ne sont pas ceux de notre train. D'ailleurs, en y regardant de plus près, les portes de ces wagons-ci sont fermées, le train est vide et il n'y a pas de passagers ou de provodniki stationnant devant comme c'est habituellement le cas lorsqu'un train fait un arrêt. C'est donc que le train que nous pensons être le notre est juste derrière. Il faut contourner ce train vert, d'ailleurs bien plus court, et nous trouverons le train bleu, le notre, le seul notre, celui où nous avons laissé nos sacs, nos bonnets, les gants de Lara, nos habits très chauds, ce carnet, bref, tout notre vie.
Juste derrière. Là, où, justement il y a une minute, un long train bleu est parti dans la même direction que le notre. Un moment de doute m'envahit soudain. Nous pressons le pas et la photo ne sera finalement jamais faite.
Ni celle, d'ailleurs, de nos deux têtes désemparées, déconfites, paniquées, une fois le train vert contourné, lorsque nous regardons une voie ferrée encore tiède du tout récent départ d'un train bleu vers plus loin ailleurs. Ailleurs, d'ailleurs, c'est un autre pays. Et entre ici et c'est ailleurs, les probabilités que s'immisce la frontière entre les deux pays augment de minute en minute.
Ben... où est passé notre train ?? Je regarde Serge, qui me regarde. Silence interloqué. Il suffit de quelques secondes pour que l'affreux soupçon devienne une évidence : " nous-a-vons-lou-pé-no-tre-train " !!! Il est parti. Avec toutes nos affaires. En direction de la frontière russe toute proche.
Argggghhhh ! Le ciel vient de nous tomber sur la tête.
Après avoir refusé encore un peu, par inertie, l'accablante vérité, trop intolérable, en vérifiant de tous côtés qu'il n'y ait pas un autre train bleu, le vrai notre, celui qui est toujours là et qui n'a absolument pas pu partir sans nous, nous nous rendons finalement à l'évidence. Le train, notre train, est réellement parti sans nous, nous laissant comme deux carafes se regardant d'un air effaré, désemparé.
Je bascule instantanément en mode survie et mes neurones se connectent à toute allure. Je fais mentalement l'inventaire de nos ressources : nous avons sur nous nos passeports (la frontière est proche !), quelques centaines de Hrivnias, l'appareil photo et tous les numéros de téléphone utiles à appeler en cas d'urgence. Ouf ! Pensée suivante : nous savons qu'à l'une des gares suivantes notre train va s'arrêter près d'une heure. C'est notre unique chance de le rejoindre. La conclusion s'impose , lumineuse : il faut savoir si un autre train part bientôt dans la même direction, ou -au pire- prendre un taxi pour tenter de rejoindre notre train à la gare suivante. Toute cette cogitation prend à peine quelques secondes pendant que -fébriles- nous courront vers le guichet.
Au guichet des informations, nulle question de contacter le train pour qu'il nous attende. Les trains n'attendent pas. C'est d'ailleurs pour cela qu'ils ne sont jamais en retard. On nous conseille fort peu aimablement d'essayer de le rattraper à l'une des prochaines gares.
" Mais comment faire ?
- Allez-y en taxi !
- En taxi ??
- Bah oui ! Vous n'allez pas réussir si vous y allez à pied ! "
La femme-cerbère nous dit les noms et les horaires des prochains arrêts du train. Trop vite. Je lui demande de répéter. Elle répète. Trop vite. Je réitère ma question. Agacée, elle me tend un minuscule bout de papier sur lequel elle a griffonné de manière illisible les noms et horaires (d'arrivée ou de départ ?) du train dans les deux gares suivantes.
Nous sortons de la gare en courant, et nous dirigeons vers la prochaine épreuve : limiter la casse pendant la négociation avec le chauffeur de taxi.
La mort dans l'âme, je demande : " Nous devons nous rendre à... . ". Je n'arrive pas à lire. Un des trois gaillards m'arrache le papier des mains. C'est évident, il a déjà compris notre triste sort, et je le vois mentalement faire de subtils réglages : " Jusqu'où je peux aller ? Jusqu'à combien ces naïfs touristes sont-ils prêts à payer pour se sortir de la sombre merde dans laquelle ils se sont mis? Cinq cent, mille hrivnias ? Y a-t-il d'ailleurs une limite ?"
Ca commence mal : la première gare inscrite sur le papier est déjà rangée au rang des utopies, le train y sera bientôt. Il faut tenter la seconde gare. Comment vérifier la véracité d'une telle affirmation ? Nous ne sommes pas exactement des pros de la géographie locale. Pas d'autre choix que faire confiance.
Un des deux autres chauffeurs, de très mauvaise grâce, se propose pour cent cinquante hrivnias, soit environ vingt euros. Je suis surpris par un tel manque d'audace, néanmoins, je fais celui qui est scandalisé, et invoque qu'au delà de cent, c'est bien trop cher. Il campe sur ses positions. Il nous explique que pour aller là bas en si peu de temps, il faudra tout simplement voler ! Il attend. Il sait que la montre joue pour lui. Il sait, et il sait que je ne le sais que trop bien moi aussi. La mort dans l'âme, je tente, sans y croire, un " allez, cent vingt ! ". Il accepte, avec l'humeur d'un ours des très grandes cavernes ! Tant pis, l'honneur est sauf pour tout le monde : pour nous qui ne nous sommes pas trop fait rouler, et pour le marché, qui n'a pas été biaisé par cet artefact.
Je ne peux plus rien faire. Serge a l'air d'avoir retrouvé tout son calme et négocie avec l'air dur et intraitable adapté à la situation. J'attends les résultats de la transaction, intérieurement très inquiète, tout en essayant de ne rien montrer. Nous montons dans un des taxis. Notre chauffeur a l'air particulièrement revêche. Je ne sais pas trop si je dois me réjouir ou non de la tournure de la situation. Serge me met au parfum : il a négocié la course pour un prix correct. Nous avons une chance de rattraper le train à la seconde gare. Le chauffeur va tout faire pour, mais sans garantie.
Nous nous installons à l'arrière de sa Lada tout ce qu'il y a de plus " conforme ". La banquette est défoncée, dépourvue des artifices de sécurité dont ces maniaques d'occidentaux, habitués à ce que la vie soit respectée, sont si friands, comme les ceintures et autres appuie-têtes. Nous nous préparons à affronter une heure de cauchemar les yeux fermés, pour ne pas voir la route et ses dangers pleuvoir de toutes parts. Durant ce périple, nous allons peut-être rencontrer la mort, ou au moins la croiser de près. Avons-nous d'autres choix ?
Commence alors une course contre la montre complètement surréaliste...
La voiture est dans un état lamentable (les portes ferment à grand'peine, les vitres descendent toutes seules dans les virages... ), elle fait un bruit de vieille casserole décomposée... mais elle roule ! Le chauffeur a l'air de connaître son affaire et nous démontre rapidement ses compétences sur une chaussée verglacée et défoncée. Visiblement, ici le code de la route n'est plus qu'une vague théorie !? Je ne peux pas m'empêcher de jeter un coup d'œil discret au compteur : il annonce cent trente kilomètres à l'heure sur une petite route de campagne. Gloups. Une croix orthodoxe se balance au bout d'un chapelet en bois accroché au rétroviseur central. Le poste radio du taxi hurle de la musique ukrainienne. Kusturiça n'est pas loin ! Les kilomètres défilent comme dans un rêve (ou un cauchemar ?) éveillé.
A l'intérieur, ça sent la Lada, subtil mélange d'huile brûlée, d'essence à 72 d'octane non filtrée, de sueur, de poussière sale et de tabac froid. La routine. L'odeur de beignets à la viande vient nuancer les sensations olfactives. Le chauffeur avance bien et malgré sa vitesse, nous nous sentons finalement relativement en sécurité. Il jongle avec maestria entre les plaques de neige verglacée, les autobus noircis, les Ladas encore plus déglinguées que la sienne, et les chiens errants, moteur hurlant et bouche cousue à triple tour. Notre chauffeur est concentré.
Nous tentons une amorce de détente, et pensons enfin à utiliser nos poumons et notre diaphragme pour recommencer à respirer.
Au bout de quelques minutes, j'arrive à me détendre un peu. Nous sommes ensemble, assis à l'arrière, main dans la main, et partager une telle expérience qui tient vraiment de l'Aventure, avec un grand A ! Nous avons de l'eau. Les deux beignets à la viande dont encore chauds dans ma main, et l'espoir de rattraper notre train se profile raisonnablement à l'horizon. Tout compte fait, on s'en sort plutôt bien.
Nous nous payons même le luxe d' " admirer ", fascinés, le paysage apocalyptique qui nous entoure, à perte de vue. Terrils rouges comme des déchets titanesques, canalisations noirâtres, puits de pétrole rouillés et suintants, centrales nucléaires et cheminées d'usines se noyant dans leur propre (propre ?) panache, collines éventrées, pas un hectare de terrain n'est épargné, c'est tout le territoire, dans sa globalité, qui est pouillé.
Le paysage défile à toute allure autour de notre voiture lancée dans sa course folle. C'est l'Ukraine. C'est horrible et superbe à la fois sous ce soleil d'hiver qui éclabousse la neige de lumières et d'ombres bleues.J'en ai plein les yeux. Les habitations laissent place à une campagne industrialisante où les terrils rouges sous la neige en plaques mettent une touche colorée. C'est le seul relief visible. Les arbres se découpent en noir sur la clarté du ciel. Partout, des cheminées d'usine crachent leurs panaches de fumées grises qui tracent des écharpes dans le ciel. Soudain s'encadre dans notre champ de vision une tour de centrale nucléaire.
Je ne veux PAS savoir. Je ne veux RIEN savoir !! Surtout, ne pas réfléchir, juste garder au fond des yeux ce bleu incroyable et ce paysage miyazakien qui vole autour de nous... .
C'est un moment hors du temps : nous avons pris un raccourci dans l'espace-temps rationnel, un pli dans le tissu du voyage, une porte dérobée pour rejoindre ce fichu train parti devant nous en traître, quelle mauvaise blague !
Mais Saint Christophe nous sourit : un panneau apparaît qui annonce : " blabla-kaya " (notre gare !) à moins d'une demi-heure. Un petit coup d'œil sur la montre : Ouf !! C'est bon, normalement on devrait arriver à temps. Sauf que... .sauf que la frontière n'est pas loin. Mais " pas loin " comment? Avant ou après cette gare? Le chauffeur de taxi nous a bien fait comprendre qu'il fallait avoir son passeport sur soi. Et si les contrôles à la frontière nous faisaient perdre notre maigre avance ? Aïe aïe aïe... .je recommence à stresser sérieusement. Je me sens vidée, sous adrénaline depuis trop longtemps. Tant que nous ne serons pas DANS le train, le nœud que j'ai au ventre ne se dénouera pas. On arrive. Ca y est : la gare est là. Il reste vingt minutes. Notre épopée a durée moins d'une heure. Serge règle le chauffeur et rajoute un pourboire de vingt hrivnias que l'ours champion de rallye empoche sans faire de commentaires.
Nous nous précipitons vers le premier guichet venu pour avoir des infos. Oui, le train que nous cherchons arrive bientôt, il est en retard. Et la douane, justement, c'est là, DANS cette gare, sur la passerelle qui mène aux quais. Nous sacrifions de bon cœur au rituel du passeport (au passage, nous apprenons, très surpris, que les douaniers étaient prévenus de notre aventure - par quel miracle ?-). Ouf, tout va bien. Jamais beignets à la viande tiédasses n'auront été dégustés avec autant de plaisir ! C'est qu'il fait tout de même froid sur ce quai, " pis moi, j'ai pas de gants, grrrr". Heureusement que Serge est là pour m'en prêter un. Je me sens enfin complètement détendue et soulagée.
Histoire de tromper l'attente et pour se défouler un peu après tant d'émotions, Serge cherche l'angle de vue idéal pour prendre en photo l'arrivée de notre train en gare. Je le vois jouer au touriste avec son réflexe Nikon numérique et mon esprit s'évade : je me dis que les choses ont bien changées... .il y a dix ans, jamais nous n'aurions pu sortir un tel appareil sans risquer le vol, le racket ou la confiscation sous le premier prétexte venu... .
... . A cet instant, je vois s'approcher trois militaires d'un air décidé. Avec leurs bottes, leurs manteaux et chapkas, ils semblent sortis d'un mauvais James Bond. Ils s'immobilisent dans le dos de Serge et lui tapotent l'épaule. Intérieurement, j'ai presque envie de rire : la scène est tellement caricaturale et l'air éberlué de Serge est si comique !
Mais en réalité, ça n'est pas drôle du tout : les trois treillis sur pattes à la mine patibulaire menacent réellement de confisquer l'appareil !! Arggghhh !! Mais Serge ne se laisse pas démonter et efface devant eux les photos sacrilèges. Il doit y avoir une religion ici : les postes de frontière russes, c'est comme les représentation du prophète en Iran : ça ne rigole pas !
Le train s'approche et offre le spectacle magnifique d'une puissante locomotive soviétique, virile et majestueuse, entrant comme un roi dans une gare enneigée. Je mitraille. Malheureusement, les clichés n'existeront pas, ils sont morts nés. J'ai du les supprimer au terme de l'ultime épreuve de cette épopée, celle qui n'était pas prévue dans cet imprévu général : deux douaniers et un militaires m'ont tapé sur l'épaule pendant que je prenais le train en photo et m'ont menacé de confisquer l'appareil, étant donné qu'il était strictement interdit de faire des photos dans cette zone frontière. Ils n'avaient vraiment pas l'air de plaisanter. J'ai du avoir l'air tellement naïf et surpris qu'ils ont du définitivement abandonné l'idée que je pouvais être un de ces millions de dangereux espions (" chpioni ") d'étrangers qui hantent à coup sûr les abords de l'ancienne et toujours vivace Soviétie.
Le train s'immobilise devant nous. Serge a raté la photo du siècle, mais on s'en fout. On va pouvoir récupérer nos bagages et reprendre tranquillement notre voyage, ouf !
La porte du wagon s'ouvre...
... et nous sommes accueillis au bazooka par notre responsable de wagon qui nous engueule ferme ( avec un soulagement certain, tout de même !). Nous traversons le wagon penauds, l'oreille basse, conscient du ridicule de notre aventure, mais drôlement contents d'être là ! Autour de nous les questions fusent ..je comprends " .. ;taxi ? " et je réponds avec un petit sourire " Da, taxi ! ". Apparemment, tout le monde est au courant de l'histoire des deux touristes français qui ont oublié l'heure et qui ont fait faire des cheveux blancs au gardien du wagon... lequel fait lourdement comprendre à Serge qu'il attend un dédommagement pour sa peine.
Nous retrouvons nos voisins de compartiment qui nous racontent tout : le train a effectivement pris du retard à cause de nous et le responsable du wagon a du faire un inventaire détaillé du contenu de nos sacs ( avec leur surveillance, nous rassurent-ils). L'approche de la frontière a mis tout le monde en situation difficile...
A l'issue de cet épisode " bonus track ", digne du prix spécial du jury de la " Commission N'importe Quoi ", nous sommes accueillis à l'arrêt du train par une volée de bois vert en provenance de notre provodnik qui nous tombe dessus en criant " Davaïtié na restoran,na restoran ! " Ce qui veut dire : " donnez-moi de quoi acheter de l'alcool en compensation ! ". Le temps de mesurer la portée des conséquences qu'a provoquées notre disparition, je finis par accepter de donner à notre orageux provodnik un dédommagement en monnaie sonnante et titubante. Nos voisins sont hilares, et nous envient presque lorsqu'ils nous disent que nous aurons une sacrée histoire à raconter, dont on risque de se souvenir longtemps. Je les crois. Ce que je ne m'explique pas, c'est comment nous avons pu être à ce point ensorcelés par la gare.
Nous, nous nous attablons devant nos dernières victuailles, complètement affamés et épuisés par toute cette aventure de Train Perdu et de Taxi Volant ( c'est pas le TGV, c'est le TPTV ici !). Nous décompressons enfin.
|